A la poursuite du diamant vert... Albite, Quartz... Epidot' !!!!
Parfois, la vie réserve des parenthèses inattendues...
En cette semaine du 19 au 25 août, j'aurais dû partir en Alsace, en famille, pour y retrouver ma belle soeur, mon beau-frère et leurs enfants...
Oui, j'aurais dû car un imprévu est survenu, annulant mon voyage...
Du coup, s'ouvrait à moi la perspective agréable d'un dernier séjour en montagne avant la reprise du boulot, le 26...
De plus en plus attiré par la minéralogie, j'ai donc choisi de retourner explorer sur trois jours les alentours du Pic de Pelvat, en Haute-Ubaye...
Souvenez-vous qu'un précédent article de ce blog racontait mes aventures là-haut, en juin 2011, époque à laquelle la neige encore abondante m'avait empêché de réaliser une vraie prospection...
Lundi 19 août 2013 :
Ce lundi, la météo annonce un peu de pluie sur les Alpes du sud mais tant pis, je veux profiter au mieux des 3 jours qui viennent.
J'entre dans la haute-Ubaye (Saint-Paul sur Ubaye précisément) vers 10h00 et le ciel est encore bien dégagé. 30 mn plus tard, je me gare à Maljasset, terminus automobile de cette fabuleuse vallée.
Le minuscule hameau de Maljasset, vu de la montée vers le Vallon de Mary...
Le temps d'envoyer mon lourd sac sur le dos (il pèse tout de même 17 kilos !), je me mets en marche vers le sentier du Vallon de Mary. Traversant l'Ubaye par un vieux pont de bois, je m'élève un peu sur sa rive gauche avant de prendre la direction du Col de l'Autaret.
Le parcours est superbe, longeant le torrent aujourd'hui paisible (la fonte des neiges étant bien loin !), et je me retrouve quelque temps plus tard aux abords du Plan de Parouart où l'Ubaye s'étale paresseusement entre les aulnes, les saules et les peupliers.
L'Ubaye, calme et limpide au Plan de Parouart...
Un sentier magnifique qui mène au Col de l'Autaret...
Nonobstant le fait que l'eau y est glaciale, l'Ubaye invite ici le randonneur à la baignade ou tout du moins au farniente... Mais non, je n'ai pas le temps ! La pluie menace à l'ouest et la cabane de Chabrière est encore loin !
Je reprends la marche, les épaules déjà meurtries par mon pesant sac à dos mais le coeur joyeux à l'idée d'aller me perdre de nouveau dans ces solitudes magiques...
De ci, de là, j'aperçois quelques lactaires, de délicieux champignons que je me promets de ramasser au retour si personne n'y a songé avant moi !!
Il est 14h30 lorsque j'arrive en vue de la cabane de Chabrière, perchée sur un monticule terreux en rive droite du torrent homonyme, à 2312m d'altitude. Un simple coup d'oeil suffit à me renseigner : Il n'y a pas de berger et j'ai donc toutes les chances de pouvoir m'y mettre à l'abri car la pluie est désormais sur moi...
La pluie, fine et régulière, se met à tomber sur le Vallon de Chabrière...
Au-dessus de la cabane, à l'est, s'élève la masse monstrueuse du Pelvat, occultant le paysage de son triangle sombre...
Encore quelques pas, la traversée facile (cette fois-ci) du torrent de Chabrière et je me retrouve devant la cabane. Deux bâtiments accolés m'attendent. Le premier est fermé à clé, c'est le logis du berger. Le second est ouvert. Sur la porte, on peut lire "Abri Radonneurs" (il semblerait qu'on ait oublié un "n" !!) !
Oh la "fote "!!!!!
L'endroit est exigu, sombre mais propre même si le sol est en terre battue. Pour seul couchage il y a un bas-flanc en bois ; heureusement que j'ai un petit matelas gonflable ! Dehors, la pluie commence à tomber de plus en plus fort ; on dirait bien que je sois arrivé juste à temps !!!
Le confort très spartiate de l'abri pour randonneurs !
Je dépose enfin mon sac à dos avec soulagement et inspecte mon abri... Rien de bien extraordinaire : On y trouve un très vieux poêle à bois mais il manque un bout du tuyau d'évacuation des fumées !! Un joli tas de bois, beaucoup de sacs de sels (pour les moutons), deux sacs de ciment (pour les réparations !). La charpente, toute en bois, est truffé de vieux clous qui seront pour moi autant de crochets où suspendre nourriture et vêtements...
Ca ne paye pas de mine mais on y dort pas trop mal !!
Bref, je m'installe, sans doute davantage que pour y attendre la fin de la pluie !!
10 mn plus tard, je déguste un bon café brûlant, en regardant la pluie et le brouillard par la minuscule fenêtre de la cabane...
Je décide que l'endroit est bien assez agréable pour y rester cette nuit et c'est sur cette intention que je termine tranquillement mon installation !
Une petite heure plus tard, la pluie cesse enfin et le temps s'éclaircit quelque peu. Je n'attendais que ça pour filer dehors et commencer ma prospection...
Avec sur le dos un sac vidé de tout ce qui ne m'est pas utile, je m'élance à l'assaut du flanc ouest du Pic de Pelvat. J'ai avec moi une gros marteau au poids conséquent ainsi qu'un ciseau pour fissurer les roches...
Le parcours qui m'attend est hostile et austère ; il me faut gravir 250m de D+ d'éboulis instables sur des pentes à 40° ou 45°. M'aidant le plus souvent des mains pour garder mon équilibre, je monte droit dans la pente, le souffle coupé par l'effort intense qu'il faut fournir...
Une partie de l'immense éboulis prospecté ; on voit bien le couloir que j'ai gravi !
Mais très vite, la première récompense est là : Une superbe plaque d'épidote mousse sur laquelle ont "fleuri" quelques cristaux d'albite... Hélas, la plaque est formée sur une roche énorme et malgré mes coups de ciseaux, je n'ai aucune chance d'emmener cette merveille... Tant pis, je poursuis vers le haut, les yeux rivés sur la mer de roches qui semble couler sous mes pas...
Soudain, une splendide composition d'albite, de calcite et d'épidote surgit devant moi ; la structure est assez petite pour être emportée et je m'en réjouis ! Malgré la poussière, j'entrevois de très beaux reflets sur les gros cristaux d'albite et l'épidote est d'un magnifique vert sombre. Le sourire aux lèvres, je poursuis...
Je marcherai ainsi durant plus de 2 heures, à une allure très lente (la prospection nécessite de la lenteur et beaucoup de concentration) en longeant la base de la puissante falaise qui me domine. Parfois, le sol est tellement gorgé d'eau qu'un phénomène de solifluxion se produit : Je me retrouve alors en train de glisser inexorablement vers le bas sur plusieurs mètres, avec toute une portion d'éboulis qui "s'écoule" autour de moi !
Il faut du courage et de la détermination pour crapahuter là-dedans mais je n'en manquais pas !!
Mais ce n'est pas grave ; il y a tellement de belles pièces à trouver dans les parages que les efforts fournis pour gravir de nouveau la pente ne sont jamais dérisoires !
J'aperçois tout à coup une grande veine de couleur turquoise au-dessus de moi. Visuellement, c'est d'une grande beauté mais je comprends très vite qu'il n'y aura pas de cristaux. Le minéral est amorphe, plutôt terreux et, si ce n'était sa très belle couleur, de peu de valeur pour un amateur de minéraux.
Mais cette veine n'est pas seule ; il y en a plusieurs dans la falaise, à différentes hauteurs ; toutes révèlent la présence de cuivre, c'est certain mais ce minerai n'est pas visible en surface...
De superbes veines qui laissent supposer la présence de cuivre natif...
Pour autant, je ramasse quelques belles pierres de cette magnifique couleur turquoise, tout en m'interrogeant sur la désignation minéralogique de ce minéral... Chrysocolle me semble en être pour l'instant la meilleure définition...
J'arrive enfin au couloir très raide qui coupe en deux le soubassement du Pelvat. Pour la seconde fois en deux ans, je le gravis par son flanc droit. Je trouve là de nouvelles pièces d'épidote aux cristaux assez bien formés.
Tout en haut, la pente est si raide (50°) que je choisis de m'échapper en grimpant par une courte falaise de la rive gauche. Le terrain change et les calcshistes apparaissent, mettant un terme à ma quête de beaux minéraux. Adieu les silicates, place à la calcite et aux schistes...
Je traverse un court plateau où deux jeunes bouquetins surpris s'échappent rapidement puis commence ma descente par le grand cirque de la Gavie. Je me détends, les difficultés sont terminées, mais les chances de trouver de belles pierres aussi !
Un jeune bouquetin mâle très timide ; il s'enfuira comme un chamois !!
40 mn plus tard, je suis de retour à la cabane et c'est tant mieux car une nouvelle vague de pluie arrive !! Décidément, je suis plutôt chanceux sur cette sortie !
Un coucou à mon propre reflet !!
J'extrais délicatement la quinzaine de pierres trouvées des poches de mon sac à dos et commence à les passer à l'eau claire (fournie par le captage d'une source qui amène l'eau sur la terrasse de la cabane !). Une brosse de lavage appartenant vraisemblablement au berger me permettra même de les nettoyer en profondeur ! Le top !!
Opération nettoyage de la récolte du premier jour !
Vu qu'il pleut, j'accélère l'opération pour ne pas trop me mouiller et rentre mes cristaux à l'intérieur. Lavés, éclairés à la lumière de ma frontale, ils se mettent à briller de mille feux comme des guirlandes de Noël ! Je reste muet d'admiration, ravi, ébahi par tant de beauté... Je sais que j'ai là de bien jolies pièces et que tous mes efforts, là-haut sous la falaise, n'ont pas été vains !!!
Il est temps désormais de penser au repas car il est déjà 19 heures et j'ai très faim ! Ce soir, ce sera sardines au piment, saucisson et filets de colin au riz citronné (un plat cuisiné tout prêt que je vais faire chauffer au bain-marie !)... Pas mauvais du tout, surtout quand on est affamé !!
Le repas, pris en terrasse !!!
Le repas englouti, je m'installe paisiblement pour un peu de lecture. Je suis obligé de lire à la frontale car la lumière a déjà bien décliné dehors et aussi parce que l'unique fenêtre de la cabane est vraiment minuscule !
Quel plaisir d'être là, confortablement installé tandis que la pluie crépite sur la toiture et que de lourdes écharpes de brouillard montent depuis la vallée à l'assaut des cimes...
De temps à autre, sans quitter ma place, j'envoie un coup de projecteur, avec la lumière de la lampe frontale, sur ma toute nouvelle collection et la cabane se met à scintiller de milliers de reflets...
C'est en rêvant de sublimes cristaux rassemblés par centaines dans une belle fissure que je m'endormirai une heure plus tard... Il n'est pourtant que 20h45 !!!
Mardi 20 août 2013
La minuscule fenêtre ayant pour seul volet un simple bout de contreplaqué que j'ai moi-même calé hier soir pour l'occulter, c'est un petit filet de jour qui vient me réveiller en ce matin du 20 août...
Malgré le froid (il y a de la gelée blanche tout autour de la cabane !), le ciel est d'un bleu éclatant !!! Grand beau au programme, la journée s'annonce fantastique !!
Je déjeune d'un café brûlant et de deux petits pains au chocolat, confortablement installé sur la petite terrasse de la cabane.
Quelques marmottes matinales commencent à arpenter les pelouses ; c'est qu'il faut vite se gaver avant la venue des premières neiges d'octobre !
Une marmotte profite des premiers rayons du soleil matinal !
Aujourd'hui, je lève le camp ; je range donc tout mon matériel dans mon sac que je retrouve presque aussi lourd qu'hier. Pour porter mes minéraux, j'ai choisi d'emprunter un seau de maçon en plastique dur au berger. Je le déposerai mercredi sur le chemin du retour. Ma récolte de la veille pèse tout de même plus de 3 kilos !
J'ai dans l'idée d'aller installer ma tente au lieu-dit "la Casse des Marchands", 200m de D+ au-dessus de ma position actuelle en remontant le Vallon de Chabrière en direction du Col de l'Autaret...
La distance est courte ; il ne me faudra que 40 mn pour atteindre mon nouveau lieu de bivouac.
La Casse des Marchands, c'est un énorme chaos de blocs rocheux empilés au niveau d'une cassure brutale de la vallée de Chabrière. En aval, c'est la descente escarpée vers l'Ubaye, en amont, c'est une longue plaine alluviale qui descend depuis le Col de l'Autaret et la frontière italienne...
Après avoir observé un long moment les environs, je finis par trouver un endroit un peu plat et j'installe ma micro-tente dans l'herbe grasse. J'en ai presque terminé quand soudain l'arceau supérieur casse net ! Aïe, c'est la cata ! je me retrouve avec une tente "molle", pas vraiment habitable en l'état et je n'ai pas de quoi la réparer ici...
Mon campement où je ne dormirai pas tout compte fait !!
Tant pis, tenu par le temps, je décide de partir en prospection et de trouver une solution en soirée...
De fait, je m'en tiens à mon programme du jour : La remontée du Vallon de la Bouteille pour aller prospecter sur le flanc est du Pic de Pelvat.
Il est 9h30 lorsque je commence à grimper sur le côté gauche de ce vallon très sauvage. Je choisis de reproduire ma tactique de la veille, à savoir d'aller jusqu'à la base de la falaise et de la longer jusqu'au col. Ici, cela représente une distance de plus d'un kilomètre, sur des terrains très fuyants et hors de toute trace... je sais que ce genre de cheminement est épuisant mais c'est à ce seul prix que j'ai des chances de trouver de nouveau de jolies pierres...
Une bonne partie du très large éboulis prospecté ce mardi... A droite, c'est le Col de la Bouteille.
Je ne vous décrirai pas en détail toutes les difficultés et la fatigue endurées au cours de cette fastidieuse traversée mais sachez, chers lecteurs que lorsque je suis arrivé au col, 4 heures plus tard, j'avais du mal à rester debout !
Et, même si j'y ai trouvé encore quelques jolies cristallisations, ce n'est pas le meilleur endroit où prospecter. L'effort est trop grand par rapport à ce que l'on y trouve !
Ce que j'y ai ramassé en grande quantité, c'est du génépi !! De quoi faire quelques bons litres ! C'est toujours ça de pris !!
Par contre, le Col de la Bouteille est vraiment un endroit extraordinaire ! Géologiquement, c'est la confluence de deux massifs rocheux d'origine et de nature très différentes et cela se voit !!!
De la Pointe 3126m, vue plongeante sur le Col de la Bouteille et la différence de terrain géologique !
En arrivant au col depuis le Vallon de Chabrière, on a les dizaines d'hectares de roches silicatés, cristallines, volcaniques et métamorphiques remontées du fond des océans qui constituent l'ossature et le soubassement du Pic du Pelvat tandis qu'à droite, ce sont les calcaires, les schistes, les marbres noirs et verts de la masse du Pelvat de Chabrière... Selon l'endroit que l'on observe, on a du mal à se croire encore sur la terre... Certaines minéralisations, je pense notamment aux marbres noirs et/ou aux serpentinites donnent au paysage un aspect des plus lugubres. Quant aux grès orangés et beiges, ils évoquent plutôt Mars et ses roches rougeâtres...
C'est chancelant, abattu de fatigue et affamé que je m'assois au col et que je dévore mon maigre repas (et oui, il faut savoir s'alléger en prévision de la lourde récolte de minéraux qu'on peut avoir à redescendre !!)
Je me repose un peu, puis, mon regard se porte sur un sommet face à moi ; il est de moindre importance sur la ligne de crête mais il devrait me permettre de voir de l'autre côté de la frontière, à priori du côté du Val Varaita...
Au fond, la Pointe 3126m que j'attendrais un peu plus tard !
Rejoindre ce point culminant ne devrait pas me prendre plus de 30 à 40 mn depuis ma position...
Malgré la fatigue et la chaleur (il est déjà 14h30), je m'élève peu à peu, en décrivant une large courbe sur la droite, vers ce point côté 3126m...
Là, sur cette longue pente interminable, je compléterai avantageusement ma récolte de génépi. ici, c'est du noir, le meilleur et j'en ramasserai de grandes quantités !!!
Enfin, 25mn après avoir quitté le Col de La Bouteille, j'arrive au sommet 3126m, un sommet privé de nom mais non privé de vue !!! Si le coteau par lequel je suis arrivé là est plutôt débonnaire malgré de vastes pierriers, la face nord-est, tournée vers l'Italie est vertigineuse et domine de plusieurs centaines de mètres le Val Varaita de Rui, vallée italienne dans laquelle j'ai vécu une belle aventure le lundi 29 juillet de cette année !! Décidément, le monde est petit quand on prend de l'altitude !!!
De la Pointe 3126m, la vue embrasse tout le Val Varaita !
Je reconnais chaque relief, chaque sentier qui serpentent sous mes yeux, chaque cabane... Evidemment, de là où je me trouve, j'ai un point de vue exceptionnel sur Rocca La Marchisa, le sommet gravi le 30 juillet ainsi que sur le Pelvo d'Elva. Pour autant, d'ici, aucune vue sur le Chersogno...
Au fond, c'est le Pelvo d'Elva (à gauche du centre) et Rocca La Marchisa (juste au-dessus, à droite, de la pointe du premier plan) !
Au nord, c'est le Rubren et le Salsa ; plus à l'est, c'est le Viso, toujours aussi majestueux mais accroché par la nebbia, la brume en italien. La vue ne porte pas aussi loin que je l'aurais souhaité car la plaine du Pô est chargée d'un épais brouillard bas.
Le Monte Salsa (à gauche) et le Monviso que la nebbia rattrape...
Je m'assoie et observe chaque sommet environnant, profitant de cette longue pause pour récupérer. Je sais que désormais, je n'ai plus qu'à redescendre et ça fait du bien au moral ! La matinée m'aura laissé sans force...
Très vite, le paysage italien disparaît, noyé sous la poussée de la nebbia. Celle-ci vient buter contre la muraille frontalière et monte, rageuse en sifflant et en tourbillonnant au-dessus de ma tête... J'imagine volontiers qu'il s'agit de sirènes car les volutes de brumes ont des formes généreuses et m'enlacent volontiers en m'inondant d'embruns rafraîchissants...
La nebbia monte à l'assaut des murailles frontalières...
je laisse ainsi la brume jouer avec moi de longues minutes, m'étonnant du contraste saisissant entre la chaleur de l'air ambiant et le froid qu'elle libère...
Le jeu est agréable, les sensations étranges...
Mais pour autant, l'heure tourne et il me faut songer à redescendre ; le campement est situé quelques 600m plus bas.
Je laisse la nebbia siffler autour du cairn sommital et commence ma descente vers le Col de la Bouteille, par le même itinéraire que celui pris à la montée. Encore du génépi...
J'atteins le col, fais quelques derniers clichés des étranges minéralisations qu'on y trouve puis je bascule côté Chabrière en m'efforçant de suivre le bon sentier.
Retour au Col de La Bouteille ...
Marbre vert ou jadéïte ?
45 mn plus tard, je traverse de nouveau le torrent de Chabrière, réduit là à un large ruisseau, et file tranquillement vers mon campement... Je rencontre deux randonneurs en marche vers le Col de l'Autaret ; ils sont courageux car il se fait tard et ils ne basculeront en Italie que dans deux heures environ. Je ne sais pas où ils dormiront mais le premier refuge est encore très loin...
Le vaste replat du Plan de Chabrière, entre le Col de l'Autaret (derrière moi) et la Casse des Marchands (au fond, au centre).
Je rejoins ma petite tente et m'affale, ivre de fatigue, à même l'herbe tendre. C'est à peine si je trouve la force d'ôter mes chaussures...
Un repos plus que mérité !!!!
Le lecteur MP3 dans les oreilles, je m'assoupis à moitié quand soudain, au détour d'un gros bloc, une grosse marmotte surgit et m'observe un long moment, à moins de dix mètres...
Petite curieuse !!!
Un peu plus tard, c'est l'étrange silhouette d'un randonneur qui m'interpelle... Celui-ci avance sur le sentier qui descend du Col de l'Autaret et quelque chose dans sa posture me semble curieux... En fait, je ne vais pas tarder à me rendre compte qu'il s'agit d'un vététiste, enfin non ! D'une vététiste, une dame d'une cinquantaine d'années qui roule seule, sans casque, sur un vélo semi-rigide...
Mais que fait-elle ici ??
je reste stupéfait et la regarde passer à moins de 50m, en me disant qu'il y avait tout de même des gens sacrément gonflés !!!!! Connaissant bien la descente qui suit jusqu'à la vallée de l'Ubaye, je me dis au fond de moi qu'elle n'est pas rendu et que, tout compte fait, ce qu'elle a fait depuis le Col de l'Autaret, c'était tout de même le plus simple et le plus agréable !!! Un enfer minéral l'attend désormais et, à mon avis, elle ne restera pas longtemps sur le vélo...
Bref, l'heure tourne et il est temps pour moi de réfléchir très sérieusement à l'option "dodo du soir" ! Je n'ai pas oublié que ma tente est défectueuse et que je dois trouver la meilleure solution pour dormir sereinement...
L'image de la cabane et de son confort sommaire revient flotter dans ma tête... Après tout, pourquoi pas ? J'y ai passé une nuit raisonnablement agréable, pourquoi n'en passerai-je point une deuxième ?
C'est décidé, je démonte ma micro-tente, refait mon sac au complet, dépose mes trouvailles du jour dans mon seau et repart doucement vers le bas de la vallée par un sentier détourné...
J'arrive à la cabane vers 18h ; le soleil brille encore fort mais plus pour très longtemps car il ne tardera pas à passer derrière la Pointe Basse de Mary pour ne plus réapparaître jusqu'à demain...
Je me sens fatigué, las et sale et je me dis qu'un bon bain me ferait le plus grand bien...
En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, je me retrouve en contrebas de la cabane, au bord du ruisseau de la Gavie, prêt à entrer dans la plus belle salle de bain du monde !!!! Je me déshabille, le soleil sur ma peau me fait l'effet d'une caresse et j'entre dans le cours d'eau...
Aaaaaaaargh !!!!!
C'est l'horreur !! L'eau est à 4 ou 5° seulement et le froid donne la sensation que les os de mes pieds se brisent ; je sors presque aussitôt !! Et pourtant, je ne peux pas renoncer ; j'ai vraiment envie et besoin d'un bain !
J'y retourne en serrant les dents, m'empêchant de crier tant la douleur est vive ; je m'asperge, me savonne, accélère chacun de mes gestes pour que la torture cesse le plus vite possible...
Soudain, je réalise que tout mon corps est mouillé et savonné mais qu'il va falloir me rincer... Je suis désespéré ! Je n'ai pas d'autre solution que de me plonger complètement dans le creux glacial qui bouillonne devant moi... Horreur, malheur, faut y aller !!!!
Je me jette à l'eau, m'immergeant complètement et la douleur irradie dans chacun de mes membres ; j'ai l'impression qu'on m'écartèle, qu'on m'arrache la peau... Je frotte le savon sur ma peau avec l'énergie du désespoir mais l'eau est trop alcaline pour qu'il s'en aille rapidement !! Faut insister, tant pis pour la douleur !!!!
Je sors de l'eau d'un bond, le corps comme givré et m'expose directement face au soleil... Je reste comme ça, complètement nu, exposé aux derniers rayons du soleil et cette sensation est fantastique... Malheureusement, je réalise que le soleil s'est rapproché dangereusement de la Pointe Haute de Mary et qu'un froid polaire va régner ici-même dans quelques minutes !!
Qu'est-ce qu'on est bien quand on est propre !!
Ma salle de bain ! Y'a pire !!!!! ...Enfin, là, je n'avais pas l'eau chaude !!
Je profite encore quelques instants de la chaleur puis me sèche très vite, m'habille et remonte à la cabane.
Ma cabane...
j'enfile mes vêtements chauds et regarde le soleil disparaître... il était temps !!!
Mais la soirée n'est pas terminée : Je nettoie mes trouvailles de la journée et me satisfait, en les brossant, de certaines pièces qui m'avaient paru de moindre qualité.
Puis, c'est le rituel classique du repas, vite englouti à cause du froid, un peu de lecture à la frontale ; bref, une soirée qui ressemble pas mal à celle d'hier, à la différence près que je sens bon le savon et que mon corps s'est défatigué au contact de l'eau glacée...
D'ailleurs, je passerai une bonne nuit, malgré la dureté de mon couchage et le froid ambiant...
Mercredi 21 août 2013
je m'éveille une première fois tandis qu'il fait déjà bien jour. A l'aide de ma frontale, je regarde l'heure sur ma montre ; il est seulement 7h10... Ce matin, je redescendrais vers la voiture et je ne suis donc pas pressé... Je décide de traîner encore un peu...
Soudain, c'est un bruit énorme et un flot de lumière qui me réveillent brutalement !!!!
Je me crois agressé et crie : " Qu'est-ce que c'est ??!!!"
Ce n'est qu'un jeune homme, un randonneur, qui voulait savoir à quoi ressemblait l'intérieur de cet abri et qui a donc poussé fort la porte d'entrée ! Lui aussi a été très surpris de trouver quelqu'un à l'intérieur et on a ri ensemble de notre déconvenue !!
Après m'avoir dit qu'il était 8h et qu'il faisait très beau, il est reparti vers la Casse des Marchands... J'étais désolé de ne pas lui avoir au moins proposé un café mais j'étais trop surpris, trop déboussolé pour réagir positivement à sa visite ! Tant pis !
Je me suis donc levé, j'ai préparé mon petit déjeuner, profitant ce matin de la terrasse, bien qu'elle fut encore à l'ombre...
Et c'est en buvant mon café que j'ai vu de nouveau la dame de cinquante ans et son vélo semi-rigide ! Elle descendait le verrou rocheux sous la Casse des Marchands, poussant davantage son vélo qu'elle ne l'enfourchait ! J'ai soudain réalisé qu'elle avait dû camper là-haut, au-dessus du verrou et que, de ce fait, outre son âge, sa solitude et son manque d'équipement, elle devait nécessairement porter également une tente et de quoi se restaurer pour plusieurs jours !!!! Un seul mot m'est venu à l'esprit : "C'est une folle !!!!"
Tiens, encore elle ??? Sans casque et en semi-rigide !!! Une folle, quoi !!!!!!
En effet, pour pratiquer moi-même le vélo de montagne régulièrement, j'estime que rouler seul sur ce type de terrain très accidenté, sans même porter un casque et sur un vélo qui n'est pas étudié pour des terrains cassants, il faut avoir un grain !!!!
Mais malgré tout, cette dame m'a fait de la peine car, pendant de longues minutes et jusqu'à ce qu'elle soit hors de vue, je l'ai regardée lutter contre les éléments, poussant, tirant, soulevant son vélo parmi les rochers et les creux, forçant comme une damné sur des kilomètres de terrain non roulant...
Vers 9h15, j'ai pris le chemin du retour. Je n'avais pas envie de redescendre par le sentier classique et je me suis autorisé à faire un peu de prospection sur le flanc gauche du Vallon de Chabrière. Ce n'était pas une idée géniale car j'avais désormais un sac à dos très lourd à porter (ayant laissé le petit seau à la cabane, j'avais désormais tous mes minéraux avec moi !!). J'ai estimé son poids, en cette fin de séjour, à quelques 24 kilos. Or, marcher hors sentier, sur des éboulis ou des pentes herbeuses avec un tel poids sur le dos, ce n'est pas évident...
J'ai pourtant prospecter plus d'une heure le long d'éboulis plus ou moins stabilisés... je n'ai rien découvert de bien passionnant si ce n'est qu'il y a un peu d'hématite de ce côté-là et que l'épidote est toujours présent mais en cristaux peu formés la plupart du temps...
Enfin, vers 10h30, j'ai rejoint le sentier classique de descente et j'ai regagné le Plan de Parouart. J'ai croisé de nombreux randonneurs qui montaient vers l'Autaret...
Retour au Plan de Parouart, avec le beau temps cette fois-ci !! Quelle merveille !
Le long de l'Ubaye, j'ai fini par ramasser tous les lactaires aperçus lors de la montée ! J'en ai fait un plat délicieux que nous avons consommé en famille le lendemain soir !
Tout comme moi, l'Ubaye plonge vers Maljasset ...
En arrivant à la voiture, fourbu, le dos brisé par mon pesant sac à dos, j'ai été envahi par un sentiment de nostalgie... Je savais bien que cette fois-ci, je ne reverrai plus les montagnes pendant de longs mois... Elles me manqueront, comme elles m'ont toujours manqué lorsque je m'en éloigne...
J'avais beau me réjouir de ma belle récolte, d'aller bientôt retrouver les miens, la fin de ce bel été me mettait mal à l'aise.
J'aurais voulu que l'été ne s'achève jamais, j'aurais voulu partir encore en quête d'autres cristaux, voir d'autres paysages, grimper d'autres sommets et tant d'autres choses encore, et puis d'autres, et d'autres ...épidotes !!!!!!!!!
Port-Folio :
A 14h, à 2980m, l'eau n'est pas forcément à l'état liquide, même en plein mois d'août !!!!
Panorama depuis le Val Varaita (à gauche) jusqu'au Col de La Bouteille (à droite) depuis la Pointe 3126m.
Panorama depuis la tête de l'Autaret (à gauche) jusqu'au Viso (à droite) depuis la Pointe 3126m.
Un chevreuil femelle vraiment pas farouche !!!
Marmotte en mode camouflage "hautes herbes" !!!
Gentiana verna (Gentianes printanières), en pleine floraison, à 2950m !!
Un jeune bouquetin arpente paisiblement la crête frontalière...
Une once de douceur dans un univers presque entièrement minéral !!!
Une unique touffe de Pavot des Alpes, une plante très rare que je n'aurais jamais pensé découvrir ici !!!
Gentiana nivalis, la Gentiane des neiges, qui est aussi la plus petite des gentianes !!!
Le Botryche lunaire, une minuscule fougère des alpages. Elle n'est pas si rare mais très discrète par sa petite taille !
Delphinium dubium (Dauphinelle élevée), une grande et belle plante des vallées alpines...
Et pour finir, voici ma récolte de minéraux, sortie des bains de trempage, lavée, brossée, grattée :
La gangue, c'est à dire la roche qui porte les cristaux est du basalte, la roche volcanique par excellence.
Les cristaux verts et verdâtres en aiguilles ou en bâtonnets, c'est de l'Epidote...
Les cristaux blanchâtres ou translucides sont principalement de l'Albite et rarement de la Calcite...
Les roches qui soit sont uniformément de couleur turquoise ou qui forment des encroûtements de cette couleur sont à priori du Chrysocolle mais il faut que je fasse quelques recherches complémentaires ! Il y a probablement aussi un peu de malachite (encroûtements verdâtres) et de la lazurite (encroûtements bleutés)...
ça valait le coup, non ??!!!!!
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